11 juil. 2011

Shunts gauche-droite


On entend par shunts G => D, les malformations cardiaques et vasculaires qui, à la faveur d'une communication anormale, entraînent un passage du sang oxygéné de la grande circulation dans la petite circulation.

2.1 Généralités

2.1.1 Physiopathologie

2.1.1.1 Rappel de l'hémodynamique normale
 



 
Le régime hémodynamique des deux circulations est déterminé par la formule : P = Dc x R (R = résistances).
Les résistances vasculaires à l'écoulement étant beaucoup plus élevées dans la grande circulation, les pressions sont beaucoup plus élevées dans les cavités gauches.
 
2.1.1.2 L'existence d'une communication anormale entre les deux circulations est la condition nécessaire et suffisante à l'apparition d'un shunt gauche-droit.
 
2.1.1.3 Conséquences des shunts gauche-droite :
 
- enrichissement en oxygène du sang des cavités droites,
- augmentation du débit pulmonaire (DP > DS) d'où dilatation des artères pulmonaires entraînant des troubles ventilatoires (dyspnée, surinfections) et une hypervascularisation sur les radios.
La pression dans l'artère pulmonaire peut augmenter (H.T.A.P.) ainsi que secondairement les résistances artériolaires pulmonaires (avec constitution d'une "artériolite" pulmonaire avec hypertrophie de la média, puis hyperplasie de l'intima des artérioles).
- un retard staturo-pondéral et une déformation thoracique avec bombement antérieur peuvent également s'observer.
 

2.1.2 Classification physiopathologique

Groupe
Débit du shunt
Pression pulmonaire
Résistances pulmonaires
I
Faible
Normale
Normale
 
II
a
b
 
 
 

Important
Important
 
 
 

<2/3 P systémique
>2/3 P systémique
 
 
 

Normales
Normales (ou un peu augmentées)
 
III
Faible
= P systémique
Augmentation ++
IV
Modéré
Normale
(mais gradient VD-AP)
Normales

2.2 Communication interventriculaire (C.I.V)

La plus fréquente des cardiopathies congénitales (20-25%).

2.2.1 Anatomie

La déhiscence du septum ventriculaire siège :
- le plus souvent dans le septum membraneux ;
- plus rarement dans le septum musculaire, ou dans le septum d'admission ou au niveau infundibulaire.

2.2.2 Clinique

2.2.2.1 C.I.V I (Maladie de Roger)
 
- Pas de symptomatologie fonctionnelle.
- Examen :
  • Souffle systolique frémissant, mésocardiaque, irradiant en rayons de roue ;
  • B2 : normal au foyer pulmonaire.
- Radio :
  • coeur de volume normal ;
  • arc moyen gauche convexe.
- E.C.G. : normal. 2.2.2.2 C.I.V II
 
- L'hypotrophie est fréquente chez le nourrisson. La dyspnée, lors des biberons et les infections respiratoires sont habituelles.
- Examen :
  • souffle systolique 3-4/6 ;
  • B2 augmenté au foyer pulmonaire ;
  • roulement de débit fréquent à la pointe.
- Radio :
  • coeur augmenté de volume ;
  • hypervascularisation pulmonaire.
- E.C.G. : hypertrophie ventriculaire. (à prédominance gauche dans les C.I.V IIa, à prédominance droite dans les C.I.V IIb)
- L'échocardiogramme permet de visualiser la C.I.V et d'apprécier son retentissement sur les cavités cardiaques et l'artère pulmonaire.
- Le cathétérisme est souvent indispensable avant de décider d'une éventuelle intervention.
 
2.2.2.3 C.I.V III :
 
Il s'agit en règle de formes évoluées, souvent négligées.
- Le souffle est peu intense, voire absent. En revanche, le B2 est claqué au foyer pulmonaire.
- Radio :
  • la cardiomégalie est modérée ;
  • les artères pulmonaires proximales sont dilatées, contrastant avec une hypovascularisation périphérique.
- ECG : hypertrophie ventriculaire droite exclusive.
 
2.2.2.4 C.I.V IV (= C.I.V. "à poumons protégés")
 
Une sténose pulmonaire est dans ce cas associée à la C.I.V.
- La tolérance fonctionnelle est bonne le plus souvent.
- Clinique :
  • le souffle systolique est intense, maximum haut situé ;
  • le 2è bruit est diminué au foyer pulmonaire.
- Radio :
  • pas de cardiomégalie ;
  • vascularisation pulmonaire normale ou peu augmentée.
- E.C.G. : hypertrophie ventriculaire droite exclusive.

2.2.3 Evolution

Elle dépend de la taille de la C.I.V et de l'existence ou non d'une sténose pulmonaire.
Schématiquement :
- Une C.I.V I ne pose pas de problèmes, se fermant spontanément ou restant inchangée.
- Une C.I.V II peut avoir toutes les évolutions possibles :
  • soit se fermer spontanément ;
  • soit évoluer vers une C.I.V III ;
  • soit rester identique et entraîner de l'insuffisance cardiaque.
Ce sont donc les C.I.V  II qui demandent à être surveillées de près pour décider du moment opportun de la chirurgie.
- Une C.I.V  III a une évolution défavorable, mais dans un délai imprévisible.
- Une C.I.V  IV est longtemps bien tolérée mais peut évoluer vers une cardiopathie cyanogène, réalisant une Tétralogie de Fallot.
 
L'endocardite d'osler est rare mais possible dans toutes les formes et doit être prévenue par l'antibiothérapie en cas de foyer infectieux ou de soins dentaires.

2.2.4 Traitement

Il s'adresse essentiellement aux C.I.V de type II. Chez le petit nourrisson un traitement médical (digitalique + diurétique) est justifié en cas de mauvaise tolérance.
La cure chirurgicale (fermeture par patch) doit être envisagée avant que les résistances pulmonaires ne soient élevées de façon irréversible, c'est à dire en règle avant l'âge de 2 ans.

Pr. Almange

Département de cardiologie et maladies vasculaires
CHU de Rennes, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes Cedex

0 commentaires:

Enregistrer un commentaire